samedi 25 avril 2009

Jean-Marc Huitorel, critique d'art

S'agissant de la culture artistique contemporaine, au sens large, la France a longtemps accusé un retard abyssal par rapport à nombre de ses voisins et en particulier aux pays germanophones : absence de musées d'art moderne et contemporain, faiblesse des collections publiques, enseignement désuet...
Depuis une trentaine d'années (l'arrivée de la gauche au pouvoir et le ministère Lang), beaucoup a été fait pour tenter de combler ce handicap et de faire de la culture artistique un patrimoine partagé par le plus grand nombre : création des Frac, des centres d'art, redynamisation du Fnac via le Cnap, modernisation des enseignements, soutien à la création et au marché de l'art... L'art est ainsi devenu l'un des domaines les plus stimulants et les plus inventifs tant du point de vue de la création que de la capacité à fournir des outils d'appréhension du réel.
Le résultat est spectaculaire et cependant fragile. Depuis quelques années, on assiste à un désengagement progressif de l'État et à une remise en cause des acquis de l'enseignement artistique au niveau du primaire, des collèges et des lycées. Que cet enseignement soit imparfait et amendable, nul ne le conteste. Il n'en reste pas moins l'un des piliers fondamentaux d'un apprentissage des formes contemporaines et de la sensibilisation aux esthétiques actuelles, outils fondamentaux pour une compréhension critique du monde. Au prétexte de la diversification, on cherche ici et là à remettre en cause des modes de transmission et d'évaluation qui sont la garantie d'une formation à l'art et aux instances de représentation et de symbolisation. Si son but n'est certes pas d'être réduit à la pédagogie et à la médiation, il n'est pas non plus d'art vivant sans une pédagogie réfléchie et fondée sur les connaissances historiques et sur les savoirs contemporains.
L'École (publique) constitue jusqu'à preuve du contraire l'une des garanties les plus fiables pour l'accès à ces savoirs et à ces sensibilités. C'est de moyens renforcés qu'elle a besoin et non de volatilisation voire de délégation à des instances floues qui ne présentent pas la moindre garantie de sérieux et de rigueur.


Le 15 avril 2009
Jean-Marc Huitorel
Critique d'art et enseignant.

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